Navalon de tentadeo

Navalon de tentadeo
Navalon de tentadero. Photo de Carmen Esteban avec sa permission

jeudi 14 mars 2013

Ca ne pouvait avoir lieu qu'à Seville

Mon ami Angel, el coronel, me transmet cette petite merveille en illustration "flamenca" de la crise bancaire en Espagne. Les sous titres sont dans la langue du divin manchot  (j'ai corrigé, merci Ludo)mais on comprend très bien, même sans être expert.

A déguster sans modération!

http://www.youtube.com/watch_popup?v=iop2b3oq1O0

jeudi 7 mars 2013

Antonio de Ramena (1): le culte des ancêtres


On rejoint Ramena, depuis Diego Suarez, par une route plutôt bonne, qui longe la baie, sur une vingtaine de kilomètres. Comparés à ceux qui séparent Diego de Antsoii, ces kilomètres là sont un vrai délice : la route est certes étroite, mais très carrossable. On a l'impression de décrire un cercle dont le centre serait le fameux pain de sucre, à notre gauche. Immédiatement, Mathilde demande si on pourra y aller, sur ce fameux pain de sucre. Mamy explique que c'est un lieu sacré, et donc, il est interdit ou « fady » d'y poser les pieds.





Lanto, toujours prudente, nous avait bien mis en garde contre les attaques des « foroches », ces bandes de voyous qui peuvent terroriser la population de Diego, et auraient déjà commis des attaques sur cette petite route. Mais en fait depuis 2011, quand une opération d'ampleur fut menée par les policiers « merinas » de Tana, il semble que ces jeunes gens se tiennent plus tranquilles.



Même s 'il nous arrive de rire des histoires omniprésentes de « fady », et Mamy avec nous, je le soupçonne de rire, pour que nous ne le prenions pas pour un demeuré, ce qui, très franchement est tout à fait improbable de notre part. Bref, nous le soupçonnons fortement de détester, au fond de lui, rire de ces histoires, qui, s'il les transgresse, risquent d'attirer sur l'imprudent, les foudres d'une multitudes d'ancêtres vindicatifs. Et même si, pour un type plutôt évolué et moderne comme Mamy, tout inviterait à ignorer ces craintes, en l'absence de certitudes absolues, mieux vaut ne pas se risquer dans ces zones dangereuses de la pensée, qui ignorent Descartes. Pourtant, à Madagascar, les ancêtres, objets de toutes les sollicitudes sont censés être plutôt sympas.



Nous avions eu la chance, à Tana ou sa proche banlieue, d'assister à la fête de retournement des morts, et ce, dans une famille très aisée. C'est Lanto, qui, entendant la musique, et sans le connaître, le plus naturellement du monde avait demandé l'autorisation au maître des lieux, qui l'avait accordée très volontiers. Il avait longtemps séjourné à Marseille et occupait à Tana des fonctions très importantes. L'entrée dans la propriété faisait penser à une garden party. Très belle propriété, bâtiments pimpants.



Les maîtres des lieux avaient fait les choses en grand, une grande tente pour abriter les agapes des personnalités, à proximité directe de 3 linceuls posés sur une table, et une fanfare qui jouait sans interruption une musique lancinante. Ainsi exposés, les ossements attendaient d'être remis dans le tombeau. Soucieux du détail, le maître des lieux nous indiqua qu'en fait dans les linceuls il y avait 4 morts, et que, probablement faute de repères, deux avaient été regroupés dans un seul.




Le bas peuple n'était pas oublié, pour lequel on avait dressé un bar où se servait en particulier le très redoutable rhum malgache. La biture volait bas ! Jusque là, nous avions évidemment assisté à ces processions derrière une boite en carton contenant les ossements, en musique, si on peut dire. Mais c'étaient des cérémonies bien modestes, bruyantes certes, mais dépenaillées, en comparaison du faste très bcbg déployé ici. Mamy dit que c'est aussi pour la famille une façon d'exhiber son aisance et ses richesses.



Ceci pour dire que les ancêtres malgaches, habitués à tous les égards, jusqu'au dépoussiérage périodique de leurs ossements lors de ces joyeuses cérémonies, auraient peut être tendance à ne pas tolérer le moindre manquement au respect des « fady » qu'ils multiplient à l'infini. Certainement, pour qu'on ne s'avise pas de les oublier ou de douter de leur omnipotence ! A force de tant de gâteries, ils doivent finir par être un poil caractériels ou carrément infantilisés. C'est mon interprétation de mécréant. L'aptitude de tous les malgaches à côtoyer l'ésotérique m'a toujours surpris, y compris dans des milieux socialement et culturellement très évolués. Ici, en tous cas, on fait la queue pour passer à table, en compagnie des ancètres.




Il fallut visiter le tombeau, nouveau aussi. Là Lanto et Mamy n'étaient pas vraiment à l'aise, alors que le propriétaire nous invitait à entrer dans le bâtiment. Nos amis malgaches restèrent à l'extérieur. Il nous expliqua comment les linceuls allaient bientôt être remis en place, sur des étagères en bois, et aussi les « fadys » qui accompagnent cette cérémonie. Je crois avoir compris qu'il fallait faire 7 fois le tour du tombeau, dans un sens précis et aussi que si on amenait les linceuls par un chemin, il fallait revenir par un autre. Bon, c'est ce que je crois avoir compris.



Retour donc à la fête. On nous propose de nous alimenter aussi, nous déclinons l'invitation. Et puis, la musique est vraiment entêtante. J'en ai maintenant un peu assez. Je m'étonne aussi du nombre invraisemblable de musiciens de cette « banda » composée pratiquement uniquement de bois et de cuivres qui sonnent dans un timbre plutôt strident. Donc, laissons les ancêtres à leur repos vigilant. Maintenant, je sais qu'ils ne dorment que d'un œil, en attendant qu'on change leur linceul.



L’hôtel est posé au bord de la baie, à proximité d'une mangrove. C'est un petit hôtel d' une dizaine de bungalows. Le notre donnait à même la plage, par une terrasse ombragée. Juste un muret à descendre pour rejoindre un transat et un abri du soleil très couleur locale, en bois massif. Cette année j'avais décidé de ne pas emmener de livre. La privation de lecture était rapidement devenue intolérable. A l’hôtel, ils proposaient quelques livres français : j'ai pu en particulier relire « Que ma joie demeure » de Giono, ce livre qui, adolescent, m'avait tant troublé. Je dois à la vérité de dire que cette relecture m'a plutôt déçu. On prend le petit déjeuner ou les repas en plein air près de la piscine . La vue est incroyablement belle et lumineuse, comme partout à Madagascar.
 
à suivre?