Navalon de tentadeo

Navalon de tentadeo
Navalon de tentadero. Photo de Carmen Esteban avec sa permission

jeudi 26 août 2010

pour maja lola

Depuis quelques années, je suis, sans en connaître les raisons réelles, « aspiré » par la Guerre d’Espagne. C’est que l’affaire n’est pas simple et a suscité une littérature imposante.


Bien sûr, cette horreur absolue était prémonitoire de la secondaire guerre mondiale, mais elle portait aussi en germes d’autres poisons, d’autres outrances qu’on a cherché à assimiler à la fameuse « hispanidad », et certaines relations particulières qu’auraient les habitants de la « peau de toro », avec le morbide.

On peut entendre toutes sortes d’explications. On peut être convaincu ou ne pas l’être, tant il me semble exact que les mots peuvent encore plus parler par leur envers. Les poètes le savent bien mieux que moi, et les artistes en général aussi.

Lisant sur ce thème de la Guerre d’Espagne tout ce qui passe à ma portée, j’ai acheté le « récit » de Michel del Castillo intitulé « Le Temps de Franco » il y a quelques années.

Cette lecture m’a retourné, au sens propre : celui de l’estomac qui se retourne. J’avais l’intention d’en rendre compte par un bref texte critique, mais, de lecture en relecture, la première impression nauséeuse ne faisait que se confirmer.

Un vieux monsieur surnommé Francis, aux abords de sa centième année, est mort dans un centre hospitalier. Cet ancien inspecteur d’Académie, ami de mon instituteur de père, m’avait dit un jour que je lui demandais conseil sur la technique du commentaire de texte : « le commentaire de texte, c’est un don de soi ».

Francis allait à l’essentiel, avec une grande économie de mots. Il m’avait fait comprendre que commenter un texte n’était pas le paraphraser ou le raconter, mais bien, et surtout, dire ce qu’il provoquait en moi.

Je n’eus plus que de bonnes notes dans cet exercice périlleux, et littérairement parlant, cette seule phrase, non seulement, me projeta dans le camp des lecteurs, mais aussi m’exclut des rangs des écrivains.

Ayant découvert la justesse implacable de ce « don de soi » appliqué à l’appréciation de l’art d’écrire, je ne tardai pas à vérifier qu’il était également applicable à tout art.

C’est maintenant ce dialogue intime qui m’intéresse avec l’écrivain ou tout artiste, et ce qu’il peut invoquer de plaisir, de souffrance, d’adhésion ou de répulsion, au même titre que la vie, dans son cours.

A l’évidence, Michel de Castillo est un écrivain. Son écriture souvent lumineuse, toujours élégante, parfaitement organisée entraîne le lecteur dans une adhésion immédiate. Il ralliera à ses thèses un lecteur peu impliqué ou tout simplement n’ayant qu’une connaissance superficielle de la Guerre d’Espagne.

Pour reprendre son appréciation de Franco peintre, qui produisait des tableaux « léchés », il s’agit d’une écriture « léchée », et, de plus, terriblement professionnelle.

Reste que, lorsque vous avez bu à ce flacon, une lie se dépose au fond de votre gorge, prégnante, indéfinissable et assez obsédante.

Pourquoi donc ce discours, qui finalement se veut consensuel, de parité des responsabilités entre « franquistes » et « républicains », discours par ailleurs souvent élégant dans sa forme, a-t-il fait naître en moi, comme une « impérieuse nécessité » d’en débattre sur le fond, demeure un mystère.

Peut être parce qu’au tout début des années soixante, mon frère faisait le trajet jusqu’à Barcelone sur son vélo Peugeot jaune. Son but premier était de rendre visite à une « correspondante » barcelonaise dont il pensait être épris, mais aussi pour emmener dans ses sacoches des livres prohibés qu’il offrait à Mademoiselle Marin.

Mademoiselle Marin avait été semble t-il la proche de Federico Garcia Lorca. Plus de quarante ans après, je ne trouve aucune raison d’en douter, même si le temps et le scepticisme que m’a appris la vie, auraient tendance à m’y inciter.

Je lui ai rendu visite avec mon frère, l’année d’après. Elle pleurait lorsqu’il lui donnait des livres, puis nous parlait de Lorca ou nous en lisait des poèmes. Elle vivait en plein « barrio gotico », le vrai celui de ces temps là, dans une chambre sous les toits.

Je me plais à me la remémorer avec ses cheveux de neige, et ses yeux que les larmes emplissaient de mer. Peut être après tout, était t’elle brune avec des yeux noirs, en tous cas, ses larmes étaient réelles.

De plus, l’affaire n’était pas absolument sans risque car la Phalange veillait sur les lectures des espagnols, et aussi car Mademoiselle Marin, compte tenu de son passé supposé de « roja » , devait faire l’objet d’une surveillance particulière.

En bas de son immeuble, lorsque nous repartions, des putes nous demandaient des « cubalibres » en reniflant. De retour en France, à la table familiale, avec mon frère nous disions parfois « cubalibre ! » en reniflant bruyamment, et nous riions comme deux andouilles, sous l’œil réprobateur et stupéfait de notre père.

12 commentaires:

Marc Delon a dit…

1) Que ne m'as-tu fais passer de tels textes !
Moi, le militantisme, c'est pas mon truc, mais le sensible, oui ! Ferme ce blog immédiatement et vient écrire ça chez moi ! ;-)

2) Désolé de t'envahir mais peut-être n'y a-t-il que moi qui ai compris comment laisser un commentaire ici...? (un hasard pcq je ne suis pas bon...)

3)Si tu persistais dans l'existence de ce blog, "Adios Chulo" c'est très bien comme titre, je trouve, finalement...

el Chulo a dit…

de quel commentaire parles tu?

si tu veux honorer mon blog d'un de ttes textes, c'est sans problème, tu n'en doutes pas je pense. la voie email existe non.

pour le reste, je ne sais pas

Marc Delon a dit…

c'est marrant on a du mal à communniquer : tu ne comprends pas ce que je dis...

el Chulo a dit…

ben merde, tu les laisses les commentaires non? je suis tres con sur ce machin, j'essaie de comprende comment ça marche. mais bon, il me semble recevoir tes commentaires et je fais comme ludo, je laise tout en live!

Marc Delon a dit…

C'est bien ce que je disais, tu ne comprends pas ce que je dis...

ben oui mais il n'y a que moi... alors je me demandais si le système était pas un peu compliqué (on a vu déjà Maja Lola y renoncer et me demander de le l'y aider)
bref c'était aussi une façon (certes très...) subtile d'encourager les autres à commenter ! Bourre de catalaniste borné ! ;-)
Quant à tout laisser en live, pas pour moi : le webmaster est responsable de ce qui s'écrit chez lui et c'est lui qui récolte le procès en lui et place du déposant...

Xavier KLEIN a dit…

Chiant le Marco. T'as pas fini d'emmerder notre ami le poète qui pond d'aussi beaux textes?
Déjà que tu m'engueules pasque je lis pas.
D'abord ch'sais pas lire, je regarde que les images quand yen a.

el Chulo a dit…

ben tu y arrives bien non, et xavier aussi.

el Chulo a dit…

peut être qu'il faut passer par un compre google ou quelque chose comme ça!

el Chulo a dit…

sympa xavier! ça donne d'autant plus de poids à ta flatteuse appréciation. j'ai pas vu d'imahe à regarder. la prochaine fois j'essaierai une bd dans bulles!

Marc Delon a dit…

Oui, oui, je le reconnais, je suis quelqu'un de chiant. Mais bon...si on comprenait ce que je voulais dire je le serais moins...

Bon Maja Lola, oh, un effort, c'est pas si compliqué de déposer ici, si ?

el Chulo a dit…

bon la lucidité est le début de la sagesse.
mais je suis assez satisfait de ne pas être le seul à ne pas te comprendre, je n'avais pas dit "chiant".
une bise à ta fidèle gina.

el Chulo a dit…

Marc m'adresse ce message.
pour des raisons techniques probablement connues, Maja lui a transmis sa réponse afin que je la joigne ici.

Tiens Bernard, maja Lola me fait passer son commentaire qui s'intitulait non pas "chulo.doc" comme je l'ai enregistré dans mon PC, mais "Superbe texte.doc".
Prépare ton Kleenex, il devrait t'émouvoir aux larmes.
Cette femme est étonnante de synthèse clairvoyante.
Je me suis permis de le lire puisque c'est destiné à être commentaire de ton post. Tu pourrai l'y placer d'ailleurs dessous...
Hasta pronto