L'Ami Xavier Klein d'Orthez me fait parvenir cet intéressant article sur le Carlisme et ses ramifications. C'est avec bonheur que je le publie, en le remerciant pour sa généreuse et participative attention.
Par ses articles passionnants, Chulo m’a vraiment donné envie d’aller outre et d’en savoir plus sur la guerre civile, ses causes et ses conséquences.
Il abordera sans doute bientôt l’état des forces en présence, dont l’une des composantes m’a fortement intéressé.
Il s’agit de la mouvance CARLISTE, qui m’a intrigué par son incongruité, dans la mesure où un mouvement né circonstanciellement au XIXème siècle, s’est prolongé au XXème avec des conséquences inattendues.
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Le carlisme est issu d’une querelle de succession dynastique qui recouvrait en réalité des divergences politiques profondes.
En fait, c’est un français qui «a foutu la merde à l’origine», soit Philippe de France, duc d’Anjou, petit fils de Louis XIV, qui monte sur le trône d’Espagne en 1700 sous le nom de Philippe V, el Animoso (ce qui provoqua d’ailleurs la guerre de Succession d’Espagne de 1701 à 1714).
En 1713, il impose à l’Espagne la Pragmatique Sanction qui établit, comme dans la monarchie française, la Loi Salique, qui dispose de l'interdiction faite aux femmes de succéder au trône.
Or dans les années 1830, l’un de ses descendants, Ferdinand VII veut transmettre la couronne à sa fille Isabelle (il n’a pas de fils).
Un parti s’oppose à cette décision arbitraire et illégale non approuvée par les Cortes, prenant parti pour l’héritier légitime Charles de Bourbon, frère de Ferdinand (et oncle d’Isabelle). Charles = Carlos. Ses partisans seront donc les carlistes.
Par delà la querelle dynastique, le carlisme incarne un courant conservateur, voire traditionaliste, ultra-catholique et défenseur des droits locaux (los fueros) par opposition au courant isabellin plus libéral (au sens du XIXème siècle), moderniste et centralisateur.
Le carlisme sera à l’origine de 3 guerres civiles qui interviendront sous les règnes d’Isabelle II (1833 à 1868), de son fils Alphonse XII (1874 à 1885), et de son petit-fils, Alphonse XIII (1886 à 1931). 3 guerres qui de 1833 à 1840, de 1846 à 1949, et de 1872 à 1876 ensanglanteront une Espagne déjà passablement en retard social, économique et politique sur le reste de l’Europe.
Ces guerres, et l’influence du Parti Carliste concerneront surtout les provinces du Nord à forte identité régionale (Pays Basque, Navarre, Catalogne et Aragon).
L’anticléricalisme de la Seconde République entraînera un renouveau de ce courant politique qui a toujours joui d’un important soutien populaire, animé d’un fort sentiment religieux traditionnaliste.
Les carlistes et leurs unités paramilitaires, les requetès, ont largement soutenu la rébellion franquiste, prenant part à la plupart des opérations militaires.
Le franquisme a tenté en permanence d’affaiblir et d’agglomérer le carlisme au phalangisme (qui est de nature fasciste), sans réellement y parvenir. Le mouvement carliste, s’il a favorisé le coup d’état du caudillo, n’a jamais véritablement adhéré, au moins pour des raisons dynastiques, à l’idéologie franquiste.
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C’est à la mort du vieux débris en 1975, qu’émerge le paradoxe.
Depuis les années 1970, le carlisme s’est petit à petit scindé en deux mouvements totalement divergents.
D’une part, dés 1986, la Communion Traditionaliste Carliste, très majoritaire, demeurera un parti ultra-catholique, conservateur et monarchiste.
D’autre part, le Parti Carliste, soutenu jusqu’à son décès le 18/08/2010 par le prince Charles-Hugues de Bourbon-Parme (Charles-Xavier de Bourbon Parme est désormais le prétendant), constitue une curiosité politique absolue de «gauchisme nationaliste», un courant mélangeant socialisme autogestionnaire, régionalisme identitaire et fédéraliste, écologisme, anti-impérialisme, avec un substrat de catholicisme social, introduit à la suite du concile Vatican II.
Pour conclure, le Parti Carliste se revendique comme le plus vieux parti politique d’Europe.
Si lors d’une virée en Navarre, vous croisez des olibrius portant béret rouge avec gland doré, et arborant des bannières blanches barrées des «bâtons noueux de Bourgogne» écarlates (« d'argent au sautoir écoté de gueules »), vous aurez sans nul doute affaire à des carlistes en goguette.
Ne les maltraitez pas trop, c’est une espèce en voie de disparition…
Pardon à tous de m’être permis cette incursion d’histoire politique sur les terres chuliennes.
Xavier KLEIN
Site du Parti carliste : http://partidocarlista.com/?page_id=2
Site de la Comunión Tradicionalista Carlista : http://www.carlistas.es/quienes-somos.php
3 commentaires:
Mon cher Xavier,
quelques remarques:
1) Franco a effectivement aggloméré Falange y Carlismo, mais ce fut l'oeuvre surtout du très Falangiste et Fasciste et clairvoyant cunadisimo, pour deux raisons:
la première, le prétendant au trone des carlistes avait 80 ans et sans descendance, donc, c'était celà ou mourir, d'autre part, il s'agissait de contrecarrer la tendance "alphonsine" plus ouverte sur l'extérieur et critique. Ce fut donc "el movimiento".
2) le carlisme lui amenait toute la branche intégriste du haut épiscopat espagnol, parfois en contradiction avec le vatican qui souhaitait une attitude plus "possibiliste". Lequel épiscopat, Segura, pouvait être farouchement monarchiste.
Pas Simple!
Ayant fait celà il parvint à écarter Fal Conde qui tenait les carlistes ainsi que Gil Robles de la Ceda qui contrôlait les forces catholiques.
Je te remercie Javierin pour cette belle intervention.
Je me per
mettrai toutefois de faire deux remarques qui ont à voir avec ce que j'ai écrit précédemment:
1) lorsque serrano suner fit la jonction entre les forces phalangistes et carlistes pour créer le "movimiento" c'était évidemment pour contrebalancer d'autres forces, dont les "alfonsinos". Au passage on élimina le naif Hedilla successeur pâlichon de Jose Antonio, Primo de Rivera.
2) le poulain des carlistes avait 80 ans, sans héritier et donc, il fallait chercher autre chose.
Remarquable aussi de constater que Franco a réussi d'écarter ausi bien Fal Conde que Gil Robles.
Très intéressant et complet cet article de X. Klein. Et pour illustrer un peu musicalement, pourquoi pas un des hymnes carlistes les plus connus : "Dios, Patria y Rey". (You Tube, puis "requetes").
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