Navalon de tentadeo

Navalon de tentadeo
Navalon de tentadero. Photo de Carmen Esteban avec sa permission

mardi 14 juin 2011

"Ni un cuerno" disait t'il

Ludo nous a écrit, à quelques uns de ses amis. « Ni un cuerno » disait t'il. Lui aussi a mal à son aficion, et le dit. Je pensais aller à Vic, mais des circonstances indépendantes de ma volonté m'en ont « empêché ». Maja va encore parler de dérobade. Et puis lorsqu'on commence à se dire que 150 km c'est bien loin, et où on garera et comment on reviendra, c'est de toutes façons très mauvais signe. Et, à vrai dire, je me demande si j'ai vraiment des regrets.



Ami Ludo, je crois hélas que nous ne sommes pas les deux seuls dans ce cas.



Regarde Angel, notre vaillant « coro », abonné historique de la andanada 6 de las Ventas, à la place qu'occupait son père, qui plus est, né dans le quartier. Je crois que pendant la San Isidro, il vaque à d'autres occupations. Il terminera « body buildé » tu verras. Avec une sangle abdominale et des pectoraux dignes de Cayetano. Je veux voir tout de même !



Et notre vaillante « rayana » Carmen, lutte toujours pour cette corrida que nous aimions. Bec, griffes, ongles dehors. Elle n'abandonnera jamais notre chère et vaillante « gitana », qui souffre dans son âme et sa chair de la descente aux enfers et des fautes de goût taurin de las Ventas, devenues selon « coro » une plaza de troisième catégorie. Il exagère tout de même en évoquant Marbella ou Torremolinos.



Il y a des exceptions, bien sûr, et remarquables. Xavier lui, espère toujours. Et c'est vrai, que si des corridas vont me manquer, ce seront celles d'Orthez, aussi pour les amis, le vin entre amis et les rires promis. Il a raison Xavier de dire que la corrida a connu d'autres crises, mais tout de même, il restait des points de référence, et le terrible et nécessaire pour être vraiment « matador de toros » adoubement de las Ventas. Il le sait bien, Xavier, que la corrida a changé de nature, pour devenir uniquement un « spectacle » formaté, répétitif et sans surprise. Et nos vaillants toreritos seraient de plus, tous, des artistes.



Bernard, Largocampo n'abandonnera pas non plus. Lui il court après le grand toro, le vrai grand toro, encasté, celui qui te fait frissonner lorsqu'il entre en piste. Il ira dans les arènes où il a quelque chance de croiser cet animal mythique qui grandit l'homme qui l'affronte et la corrida. Il a raison, il doit bien en rester dans le campo, même, par accident génétique, chez le senor Victoriano del Rio. Il y a peu de chance toutefois de le croiser sur les traces « del roulis », ou de Ponce ou de nos vedettes du G10 torero. Il ira plutôt dans des plazas qui sentent la peur, la pisse et le crottin de cheval et où, avant d'entrer en piste, les toreros ont quelque chose au fond des yeux d'autre que l'élégant détachement de nos artistes stakhanovistes.



Et Lui, qui pouvait traverser l'Espagne pour une véronique de Morante, et avant, de Curro ou de l'autre Paula, me dit ce matin, qu'il ne voyait plus aucune corrida. Et, a t'il ajouté, ceux à qui j'en parle font de même. Curro Vasquez qui n'est pas n'importe qui, veut faire de Morante un torero grand public, or, évidemment, Morante a autre chose en lui, et ne pourra certainement pas faire ce qu'on lui demande. Doit t'on penser alors qu'il manque de personnalité, ou de volonté ou que sais je. Ou peut t'on le blâmer d'aimer l'argent plus facilement gagné. Comme si on comparaît Brel à Dave, en quelque sorte. Brel lui, est parti quand il considérait qu'il n'avait plus rien à dire. Et Lui a aussi constaté que les arènes étaient toujours pleines, sans la poignée d'emmerdeurs.



Delon lui aime les toros. Il est aussi aficionado. J'avais acheté son premier livre à compte d'auteur. Il est je pense encore plus photographe qu'aficionado, et la corrida est une mine de photos. Et par dessus tout, il veut trouver dans cette fleur flapie l'inspiration qui lui fera gagner l'Ernesto. Suerte donc ! Je le sais la corrida était aussi une forme de littérature, peut être même la forme suprême de littérature. C'est devenu un digest et les toreros ont des gueules à boire du coca cola, sauf Morante !



Voilà sans parler de beaucoup d'autres. J'en connais même qui furent d'intransigeants critiques dans les gradins, même volontiers gueulards, et ils n'avaient pas tort, qui, venus aux affaires sont infiniment plus conciliants. Et, après tout, si les gens qui remplissent les étagères passent un bon moment et sont satisfaits de ce qu'ils voient, c'est que notre place n'est plus ici.



Simplement tout le monde sait bien, que réduire la corrida à un spectacle comme un show de girls au Lido, c'est aussi la priver de toute chance de perdurer. D'où, évidemment, cette ruée sur le patrimoine de mes machins et cette recherche forcenée de protection auprès du Karcheriseur.



De même que ces manips lamentables pour passer à la Culture en Espagne, avec à la clé de possibles subventions, comme si, la littérature étant un art, tous ceux qui savent écrire sont des artistes, idem pour la peinture, le chant, la danse etc..............



Et je crains fort que les retournements de veste spectaculaires de nos penseurs, soucieux d'éthique, non je ne rigole pas, soient parfaitement inutiles, car un corps sans âme est un corps mort.

3 commentaires:

Maja Lola a dit…

Oye Chulo ! Je viens d'écrire sur ton blog à ton amie la condesa que tu ne déposes pas les armes ....
150 km c'est "peanuts". Dis plutôt que tu es plus que désabusé.
En tout cas toujours très intéressant dans ta galerie de portraits de "los tuyos".

el Chulo a dit…

je pense avoir dit en effet que je m'inquiétais!

Bernard a dit…

Chulo ami,

Quelque chose en moi sait bien que tu as raison dans ce que tu as écrit, mais pour l'instant "ça" tient encore, ça qu'on pourrait dire aficion... Mais ça ne tient plus qu'à si peu de fils désormais, Céret bien sûr, et Orthez (qui, comme je l'ai dit à Xavier dès 2009, me semble sur le point de devenir le "Céret du Sud-Ouest", si les "acochinados" friands de "toro moderne" ne le mange pas trop vite!)... Car, peu à peu, Vic même me semble céder du terrain: cette année, de la corrida du lundi - soudain séparée des 2 blocs compacts des samedi et dimanche où l'"imprévisible" (au sens malrucien) de la caste rôde encore, de cette corrida comme esseulée, j'aurais pu dire "Vic sombre dans le toro moderne" (mais qu'est-ce que les Alcurrucen sont venus foutre à Vic?): des toros si prévisibles, sortis de leurs emballages si bien préparés qu'il n'y plus rien à leur faire - et certes plus à devoir les "dominer" avant de les tuer (ils sont dominés dès le campo, dès avant leur conception même!... Et, au fond, puisqu'il n'y a plus à les dominer, pourquoi devoir les tuer?...).

Lundi, en quittant les arènes, j'étais plus que triste, j'avais honte!!... (des noms remontaient en moi, Ruiz Miguel, Nimeño, Ortega Cano, Espla...). Et surtout, au-delà de moi, comment dire à de frais aficionados rencontrés ici fortuitement l'an dernier et qui nous ont accompagnés les yeux brillants car emplis d'une soudaine passion pour "le toro", que bientôt peut-être nous n'en verrons plus!?... Le pire est alors de se dire en soi-même qu'il n'est plus besoin que "les poignets soient de cristal"...

Dirais-je que cet "imprévisible", qui me paraît être la vie même, nous quitte - tel un bateau qui s'éloigne? - dans presque tous les domaines?... Au profit (!) du flux, du fluide, qui nous entraîne d'autant mieux que nous devenons sans aspérités - de même que nos toros nous les préférons "à roulettes"...

Te lisant in fine ("car un corps sans âme est un corps mort"), j'ai pensé à mon cher Péguy: "Une âme habituée est une âme morte"...

Abrazo fraternel (et quoi qu'il advienne à Orthez, nous boirons à toi) - Bernard "Largo campo"